vendredi

Once upon a time in the west (27-31 oct. 2010)


Perth, Western  Australia State, Australia


Si la ruée vers l’or qui a accompagné la découverte de l’outback australien à la fin du XIXème siècle par des explorateurs anglais comme Paddy Hannan devait avoir un symbole, ce serait bien la ville de Kalgoorlie. La région abrite de nombreuses mines d’or dont certaines sont encore en activité mais "Kal" (comme disent les autochtones) reste largement le plus gros producteur d’or de toute l’Australie et fait figure d’Eldorado en la matière.  Cependant, nous constatons bien évidemment que cela n’a plus rien à voir du tout avec l’image typique que tout le monde se fait du gars qui cherche de l’or : campé debout dans une rivière, le dos courbé, l’eau jusqu’aux genoux, les yeux rivés sur le tamis fait maison qu’il secoue délicatement pour mieux discerner les rares traces d’or à la lueur d’un soleil éclatant. N’en déplaise aux romantiques et aux doux rêveurs, ce sont bien à bord d’énormes engins motorisés, de plusieurs centaines de tonnes qui creusent et creusent encore, que les mineurs, avides de conquêtes et de fortunes, partent sous un soleil souverain à la recherche des mystérieuses pépites d’or (tututu wahahaha)… En clair, le précieux minerai est extrait essentiellement sur l’imposant site de Super Pit situé sur l’arc extérieur de la ville et qui s’étend sur 3,8km de long, 1,35km de large et 500m de profondeur ! 


Le site de Super Pit !
 Nous nous laissons tenter par ce qui est sensé être une exposition sur la recherche d’or mais qui se révèle, une fois sur place, être la foire géante au matériel minier. Un sacré business se déroule ici et c’est tout naturellement que nous déambulons dans l’exposition où nous pouvons nous arrêter de temps à autres, selon l’envie, devant un stand afin d’écouter les professionnels vanter les mérites de leurs nouveaux produits. A ceci près que l’on se croirait tout droit sorti de l’émission Strip-tease. Des filles avec des mini-jupes plus courtes les unes que les autres font la promotion d’engins en tout genre et de foreuses géantes qui rendraient ridicules celles de Bruce Willis dans Armageddon. Des moustachus en chemises à carreaux et chapeaux de cow-boy à la JR, des jeunes commerciaux le sourire aux lèvres et les poches bourrées de pesos, des gros bras tatoués de partout et arborant fièrement leur T-shirt d’ACDC ainsi que des aficionados du lingot venant de tout horizon complètent le tableau. Bref, tout le gratin australien du secteur minier s’est  donné rendez-vous pour cette occasion. Nous nous demandons bien ce que nous sommes venus faire dans ce lieu aux antipodes de ce que nous imaginions. On a vraiment l’air de fameux gullies*. Cependant, nous devenons opportunistes quand nous apprenons que la bouffe et la boisson sont à volonté. Une seconde après, nous nous baffrons allègrement de sandwichs saucisses-oignons-moutarde agrémentés par un délicieux café ou chocolat au lait et du coca bien frais, tout en admirant le spectacle qui est offert à nos yeux ravis. Après tout, ce n’était pas une si mauvaise idée!


  Le mythe de Sisyphe à la sauce cailloux.



 L’or à la pelle

 Au niveau touristique, la ville entière est dédiée, tenez-vous bien, au glorieux passé des chercheurs d’or (Bizarre... Vous avez dit bizarre ? Comme c’est étrange). De nombreuses carrières, fermées aujourd’hui, peuvent être visitées. Il existe même un bar qui se situe au-dessus d’un de ces anciens gisements. A une époque pas si lointaine, les chercheurs d’or, remontant de la mine après une journée de boulot éreintante, se trouvaient directement à l’intérieur du bar pour se payer une bonne bière bien fraiche ! D’ailleurs, la star locale Slim Dusty, chanteur ès country australienne malheureusement décédé aujourd’hui, s’est fait (inter)nationalement connaître avec son fameux tube "The pub with no beer" qui prône, à grands coups de phrases interminables, l’absurdité sans nom d’un bar sans alcool ! Et ça se comprend vu la température ambiante et l’atmosphère lourde qui règne à Kal. C’est simple, depuis notre arrivée au pays des kangourous, il n’a jamais fait aussi chaud et moite qu’ici, ce qui a le fâcheux inconvénient de nous faire suer invariablement à grosses gouttes. Après avoir fait le tour de ce qu’il y avait à voir dans le domaine historique, nous reprenons la route sous une tempête "tropicale" grandissante. Tout devient vite orage et éclairs partout, soleil nulle part (!). Le vent soulève de grandes bourrasques de poussières qui viennent se mêler à la pluie battante. Nous avons un aperçu grandeur nature de ce qui nous attend sûrement lorsque nous traverserons le Nord de l’Australie, en pleine saison des pluies, en début d’année prochaine. 

Au fur et à mesure que nous avançons sur la route qui mène à Perth, nous quittons les paysages désertiques dignes des westerns d’autrefois pour un paysage plus vallonné. Seule exception notable : une formation rocheuse, creusée par la pluie au cours des millénaires et ressemblant à s’y méprendre à une gigantesque vague de pierre (lui valant le nom de Wave Rock) de plus de 120m de long et 11m de haut ! La civilisation réapparait avec des maisons situées dans les hauteurs comme dans certaines régions californiennes. En outre, le coin abrite de nombreuses exploitations agricoles propices pour un job saisonnier. Etant plus que temps de trouver un taf pour se renflouer, nous tentons notre chance dans une exploitation qui nous semble prometteuse. Le fermier nous indique cependant qu’il n’a pas de travail pour nous car son exploitation est trop petite mais qu’il connait d’autres fermiers qui seraient susceptibles de nous embaucher. Les noms qu’ils nous donnent sont tous à consonances italiennes : Reinoldi, les frères Cassotti… Ce qui à l’air de confirmer les dires comme quoi Perth et ses alentours sont la région d’Australie la plus européanisée. Les adresses en poche, nous filons à l’exploitation la plus proche avec un mélange d’excitation et d’appréhension. L’homme que nous rencontrons se nomme Angelo Ghilanducci et possède une des plus grosses exploitations du coin où les vergers (pommes, pèches, figues etc.) s’étendent à pertes de vue. Nous nous pointons donc avec nos gueules tout enfarinées dans sa grange pendant qu’il déjeune pour lui demander du travail, en ce vendredi midi. Angelo, assis devant son journal ouvert en grand sur la table, nous regarde d’en bas avec des yeux pesants. A peine arrivons-nous devant lui qu’un dialogue bref, concis et sans détours s’engagent alors :
            « Vous cherchez du boulot les gars.
Il affirmait et ne nous posait pas une question.
            - Oui, on voyage et …
            - Très bien, nous coupe t-il.
Angelo attrape alors la visière de sa casquette, la soulève légèrement pour se gratter le front de la même main, la repose sur son crâne, échange quelques mots avec sa femme assise face à lui et est pris d’un rire gras. Puis il tourne à nouveau son regard lourd sur nous, dépourvu de toute trace d’hilarité, et affirme de la même façon qu’il l’avait fait avant :
            - Alors 7h précises lundi matin.
            - 7h ?
            - Précises.
            -  D’accord, finissons-nous par lâcher, stupéfait d’être embauchés si rapidement, sans plus de formalisme. Vous pensez qu’il y’a du travail pour combien de temps ?
            - Ca dépend de vous. Si vous êtes bons, vous resterez le temps que ça prendra. Si vous n’êtes pas bons…
Et il haussa les épaules laissant sa phrase en suspens.
-  C’est parfait, fit-on amusés par son langage aussi direct et franc qu’une mitraillette Thompson à chargeur tambour.
- On se voit lundi alors, conclut-il. Et il reposa les yeux sur son journal, comme si ça demandait trop d’effort de les lever jusqu’à nous, en disant : Vous pouvez prendre une pomme si vous voulez.
            - Me … Merci, ça ira, dit-on simplement avant de partir tranquillement vers notre van, un travail en poche et l’impression d’avoir été confronté à Toni Soprano, en plus vieux et plus … fermier. »
        

 Lézard Blue tongue (à langue bleue)


Another one bites the dust !

Wave Rock



 Où est Charlie sachant qu’il a revêtu son costume d’alpaga ? Sauras-tu le retrouver à temps ?


    Nous venons donc de passer avec succès le plus cours entretien d’embauche pour du taf de notre vie ! Et c’est avec joie que nous nous dirigeons vers Perth pour passer le week-end en toute décontraction. D’autant plus que nous connaissons du monde pour nous loger là-bas… Les rencontrent que nous faisons lors de voyages s’avèrent très souvent enrichissantes et peuvent dans certains cas devenir proprement incroyables. Ainsi, c’est en faisant un trek en Islande l’été dernier que Quentin a été pris à en stop, aux abords de la capitale Reykjavik, par un dénommé Reynir avec lequel il a très vite sympathisé. Il s’est alors trouvé que cet islandais pur souche était étudiant en production design à Perth jusqu’à début décembre 2010 ! Il n’en fallu pas plus pour s’échanger les numéros et de se donner rendez-vous à l’autre bout du globe quelques mois plus tard… Lorsque nous arrivons à Perth, ville d’1,2 millions d’habitants, nous comprenons tout de suite que c’est l’endroit où il fait le plus bon vivre d’après tous les lieux que nous avons traversés. La ville est bordée par la mer et longée par un fleuve, la Swan River, que l’on peut traverser en ferry pour entrer dans le centre-ville. Ce dernier, tout en gardant une architecture australienne traditionnelle, possède un style plus européen à nos yeux, fait de rues piétonnes en son centre. De grands parcs verdoyant où l’on peut se détendre ("barbecues every days, driving fancy cars". A part que dans notre cas, on mange des pâtes et qu’on conduit un van) et apprécier la vue, dont le magnifique Kings Park surplombant le centre-ville, entourent et parsèment Perth. Nous visitons les quartiers de la ville paisiblement en van et passons notamment, au détour d’un virage, par une petite colline nommée Inglewood comme à Los Angeles (West coast, niggas ! On passe le bonjour à Dre et Jules Winfield). On en profite également pour observer une sculpture de la figure impossible du triangle de Penrose. Ce défi repose sur une illusion d’optique qui ne permet de voir le triangle se fermer qu’à partir d’un seul endroit. Les alentours ne sont pas en reste non plus. La périphérie englobe des petites villes situées le long de la mer pour la plupart. Là, de grands palmiers s’alignent indéfiniment, semble-t-il, à la suite des plages au sable blanc qui bordent l’azur de l’Océan Indien. A Fremantle, à 40 kms de Perth, nous allons nous promener dans un grand marché qui longe les quais du port où de vieux navires ont jeté l’ancre.


Perth le long du Swan River


Hammer time !


 
Vue sur  Perth depuis Kings Park


 Des parcs à profusion

 Ibis Sacré


Moment détente face à l’Océan Indien


 
C'est un fameux trois mâts.

Hissez la grande voile bande de moule-à-gaufres, bachi-bouzouks, ectoplasmes, tonnerre de Brest !


Centre-ville de Perth de nuit


            Reynir habite dans une maison au sud de Perth avec deux colocataires norvégiens, Karl et Jonas, qui font partis de la même classe que lui. Ils sont en train de terminer leur projet de fin d’étude qu’ils présenteront le mardi suivant. Reynir, notamment, à créé un prototype de kit de survie cylindrique à mettre derrière sa moto de neige. Quoi de plus normal pour un habitant d’un pays aussi haut latitudinalement ! Nous sommes un peu gênés car nous ne voulons surtout pas déranger. Cependant cela ne leur pose aucun problème et l’accueil excellent que nous réservent ces trois vikings chez eux est du genre "Mi casa es su casa". Nous avons l’impression instantanément d’être comme chez nous. Ca fait énormément plaisir surtout que nous n’avions plus passé de soirées sous un toit et dormi dans un vrai lit depuis plus d’un mois. On ne compte plus non plus le temps depuis lequel on a pu disputer un petit match de foot sur console (héhé) ! Un petit week-end entre potes sous un grand soleil est donc parfait pour se remettre d’aplomb avant de commencer le dur labeur d’un travail agricole qui nous attend au sein de Karragullen, commune aux agréables sonorités bretonnes.


 Reynir et Quentin


Ca travail dur sur son projet !



Triangle de Penrose, illusion d'optique vue sous le bon angle



Triangle de Penrose, vu hors du point d'illusion


* Voir le fameux film Blood Freak ou à défaut l’extrait sur Nanarland

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire