vendredi

Hard Working Man ( 01-06 Nov. 2010)


 Karragullen, Westren Australia State, Australia

    A 6 heures tapantes, nous nous éveillons en même temps que le soleil afin de commencer notre premier job australien. Ce dernier consiste à couper les pèches en trop en n’en laissant qu’une seule par branche pour d’une part alléger les branches d’un poids trop important pouvant les faire rompre et d’autres parts, d’optimiser la croissance des pèches restantes. Ce boulot, on ne peut plus intéressant, se déroule le long de rangées d’arbres fruitiers de près de quatre mètres de haut. Pour effectuer convenablement le travail, nous utilisons une machine agricole particulière. Cet engin, de modèle italien bien évidemment, possède trois plateformes distinctes qui peuvent se surélever indépendamment les unes des autres afin d’atteindre toutes les parties des arbres sans avoir à bouger. C’est ainsi que nous prenons place à bord de la machine, chacun sur sa plate forme, pour être former par Monsieur Angelo himself. Il nous donne, tout d’abord, nos horaires de travail, inflexibles et réglées sur-mesure comme dans les usines. Nous commencerons à 7h tous les matins et débaucherons à 16h le soir, du lundi au samedi sauf le vendredi où nous terminerons à 15h30, jour de paye oblige. Nous avons le droit, bien entendu, à 15 minutes de pause à 10h précises et 30 minutes pour déjeuner le midi. Nous travaillerons ainsi à peu près l’équivalant de 50 heures par semaine et seront payés 18 dollars de l’heure, auxquels seront retranchées les différentes taxes de cotisation. Après ces explications d’ordre comptable, nous entrons directement dans le vif du sujet :
  
     « Bon je vais vous expliquer ce que vous aurez à faire. Tout d’abord, comment vous appelez vous les garçons (Angelo aime nous parler en nous appelant à chaque fois "boys", dénomination relativement affectueuse s’il en est) ?
            - Je m’appelle Quentin (prononcez Couènetine).
            - Et moi c’est Guillaume (prononcez Guillaume).
            - Jim ?
            - Non, Gui-llau-me.
            - Je t’appellerai Jim maintenant. »

     C’est sur ces débuts prometteurs qu’Angelo commence par nous expliquer comment démarrer l’engin et faire fonctionner les multiples mannettes qui le commandent. Le bestiau se révèle très maniable mais possède par contre une pointe de vitesse proche d’un escargot malade qui aurait du mal à digérer la dernière feuille de laitue qu’il viendrait d’engloutir. En gros, c’est un peu comme si nous chevauchions un pétaure mécanique mais sans avoir besoin de fredonner une chanson paillarde pour le faire avancer ! Angelo nous dévoile ensuite la partie la plus importante de notre travail : la coupe des pèches surnuméraires. La pèche idéale à laisser sur une branche est celle qui se trouve être la plus grosse, la plus belle et surtout la plus proche possible de la jointure de la branche au tronc. Il faut donc faire un compromis (trade-off pour les puristes) entre la taille, la qualité et la distance relative au début de la branche pour choisir cette pèche idéale, sans oublier de bien repérer les ramifications possibles de petites branches qui ajoutent un facteur supplémentaire, au combien déterminant, dans la résolution du problème. Vu sous cet angle, couper des fruits n’est peut-être pas aussi aisé qu’il n’y parait de prime abord ! M’enfin, très vite nous nous en remettons à une technique ancestrale maintes fois éprouvée dans de nombreux domaines divers et variés : le pifomètre. D’ailleurs, nous nous en sortons plutôt pas mal pour le coup même s’il arrive parfois que, dans un excès d’enthousiasme, nous enlevions par inadvertance toutes les pèches de la branche. Alors dans une logique que ne renieraient pas le Chapelier fou et le Lièvre de mars, nous essayons de compenser sur les branches d’à côté en laissant des pèches par-ci par-là !


La ligne verte

 
 Braquage  l'italienne


Jim se désaltère


On s'dépêche !!!! Kapishe ?



      Après une demi heure à enlever les pèches avec nous, Angelo s’en va et nous laisse en totale autonomie. Il se fiche de la rapidité à laquelle nous allons (dans une certaine mesure) pourvu que nous fassions bien notre travail. Néanmoins, nous pensons qu’il sera facile de terminer rapidement les allées… Que nenni ! Le travail est extrêmement fastidieux et répétitif et nous nous rendons très vite compte qu’il nous faudra beaucoup plus de temps que prévu. En gros pour terminer une rangée de 150 arbres des deux côtés, nous mettons 5 jours complets, soit un travail effectif de plus de 8O heures pour une seule personne ! Nous passons d’ailleurs tellement de temps à voir ces drupes toute la journée que la nuit, lorsque nous fermons les yeux, des images mentales de pèches nous apparaissent pour ne plus nous lâcher.

     En fin d’après-midi après avoir fini notre boulot, nous intégrons un ensemble de préfabriqués dans la propriété d’Angelo qui va devenir notre lieu de vie pendant toute la durée du job. Les locaux sont relativement miteux mais fonctionnels. Nous avons ainsi, auprès des vergers, un préfabriqué qui nous sert de cuisine. A l’intérieur, une table, des chaises et des fauteuils de qualités diverses, allant du à peu près propre au franchement sale, nous permettent de nous loger très convenablement. De plus, nous avons une gazinière et un réfrigérateur en état de marche. Nous allons enfin pouvoir enrichir notre nourriture de produits frais que nous ne pouvions conserver dans le van. C’est donc avec joie que nous apprécions, entre autres, le retour en force du beurre salé qui égaye les papilles au petit-déjeuner et comble notre centre de la satiété par son gras enchanteur. Seul l’évier pose un léger problème vu qu’il n’y a pas d’eau qui s’écoule du robinet. Rien de bien méchant puisqu’il nous suffit de faire quelques mètres pour se procurer de l’eau potable à la pompe. Juste à côté, un long préfabriqué fait office de dortoir. Il se découpe en de petites chambres au charme désuet et au confort spartiate. Un lit une place et trois crochets au mur en guise de porte-manteau meublent les pièces les mieux loties. En tout cas, ça va presque nous faire tout drôle car c’est la première fois depuis le début du voyage que nous ferons chambre à part ! Lorsque nous ouvrons les portes de nos appartements respectifs, une vieille odeur nous rappelant indubitablement celle que prend une serviette de piscine mouillée après être restée une semaine au fin fond du sac de sport, flatte notre nez délicat et un nuage de poussière, tellement dense qu’il empêcherait presque les rayons du soleil de continuer leur trajectoire rectiligne, s’élève dans les airs pour rester en suspension durant d’interminables secondes. Asthmatiques s’abstenir ! Une bonne aération de quelques heures ne sera pas superflue. Et lorsque le crépuscule survient, le lieu a des accents de décors de films d’horreurs de séries Z avec un budget digne des meilleurs films d’Ed Wood. Nous pouvons en sus observer chaque soir dans la cuisine des bestioles en tout genre telles que des araignées, des fourmis, des lézards ou encore des arthropodes aux allures parfois très inhabituelles. Malgré tout, nous ne boudons pas notre plaisir d’avoir un toit où dormir et un espace plutôt confortable pour se prélasser, d’autant plus que cela nous est offert gratuitement. Et cerise sur le gâteau, à quelques centaines de mètres de là, nous avons accès à des toilettes et surtout à une douche avec de l’eau chaude, ce qui est un plus non négligeable lorsque l’on se retrouve crade et tout collant après une rude journée de boulot. 


Cuisine hélas !

Jim se roule une jaune






     Nous n’avons plus travaillé depuis Mix buffet (un des leaders français de l’agroalimentaire) en juillet dernier, si bien que se lever tôt pour aller bosser et prendre un rythme routinier ne se font pas sans quelques difficultés. Néanmoins, cela reste plus agréable de travailler à l’air libre dans la campagne que de couper du museau de porc ou de remuer des pâtes dans une immense cuve toute la journée au fin fond d’un gigantesque sous-sol. D’ailleurs le temps est de la partie avec un ciel sans nuage et un soleil radieux. Peut-être un peu trop car nous nous retrouvons vite fait à travailler sous un véritable cagnard. De temps à autres, Angelo ou son fils, que nous nommerons par défaut Angelito, se ramènent sur leur quad afin de voir si nous respectons bien les horaires et si notre travail est de qualité…

     Arrivé le vendredi après-midi, Angelo nous donne rendez-vous devant sa maison pour la remise de la paye. Nous nous pointons chez lui à l’heure avec les autres personnes travaillant pour lui, c'est-à-dire une bonne dizaine d’asiatiques. Là, étant satisfait de notre travail, il nous propose de prolonger et nous nous empressons d’accepter. Il nous apprend également qu’un intermédiaire, un dénommé Phills, va arriver pour nous remettre l’argent sous forme de chèques. Il faudra le suivre ensuite jusqu’à la grande ville la plus proche, Armadale, pour qu’il nous montre où l’on pourra retirer la thune en liquide. Cette manière de procéder et la façon dont Angelo nous l’annonce nous rappelle immédiatement les anciens films sur les gangsters italo-américains. Surtout que juste après nous avoir dit ça, Phills débarque avec sa vieille voiture pour s’arrêter juste devant nous. Il baisse la vitre, laissant découvrir un visage au teint buriné et aux yeux rougis par l’alcool et la clope, nous tend sa main calleuse en signe de salut et nous indique de le suivre bien gentiment. Nous le suivons ainsi avec notre van jusqu’à Armadale sur un parking d’un drugstore. Puis, nous faisons le reste du chemin à pieds jusqu’à la West Bank où nous pourrons retirer le blé. La discussion, lancée par Phills durant le trajet, tourne principalement autour de la ville de Paris et des jolies filles qui la composent. Après cette intéressante discussion culturelle, nous entrons enfin dans la banque, prêts à toucher notre premier salaire dûment gagné. La banquière sort un tas de billets puis le montant tombe : 644 dollars par tête de pipe pour seulement 42 heures de taf ! Cela n’est pas pour nous déplaire car nous ne pensions pas gagner autant. Si nous arrivons à faire cinq semaines de travail de suite, comme nous l’espérons, cela nous permettra de constituer un bon petit pactole avant de repartir. Nous gardons tout de même conscience dans un coin de notre tête que nous pouvons nous faire virer aussi vite que nous avons été engagés. Toutefois, ceci ne nous empêche pas de tripper durant le chemin du retour sur notre entrée au sein de la familla d’Angelo Ghilanducci. Nous nous imaginons déjà en train de grimper les échelons de la respectabilité et de la loyauté dans le cœur de ce Vito Corleone de campagne sans pour autant terminer pitoyablement le nez dans la poudre, la mitraillette à la main et tirant sur tout ce qui bouge avant de finir cannés dans la fontaine d’un palace démesuré ! La réalité nous rattrape cependant rapidement et s’avère du coup beaucoup moins réjouissante puisque nous devons travailler le samedi toute la journée avant de pouvoir profiter de l’unique jour de repos de la semaine qui nous est offert.
      Ce jour de repos arrive à point nommé. Nous en profitons pour retourner à Fremantle (a.k.a. Freo) et partir à la chasse à la baleine par l’entremise d’un bateau de plaisance affrété sur le port. Point de capitaine Achab à son bord pour nous indiquer où se trouvent ces majestueux cétacés mais à la place un scientifique qui prend les traits d’une ravissante jeune chercheuse. Le soleil s’extirpe timidement des nuages et un vent frais fait soulever lentement les vagues d’une mer d’un bleu saphir tandis que nous naviguons à quelques encablures de la côte, fendant l’écume à la recherche d’un passage fréquenté par de nombreuses baleines. Ces dernières, et notamment les baleines à bosse, remontent au printemps la côte ouest australienne pour mettre bas plus au nord. C’est donc pendant cette période que nous avons le plus de chance de les apercevoir. Lorsque les premiers spécimens pointent le bout de leur bosse, c’est la cohue sur le bateau. Notre jeune scientifique se transforme alors en commentatrice sportive zélée en nous donnant des « Deux baleines à dix heures ! » par-ci, des « Regardez les jets d’eau qui sont expulsés par les évents… Si c’est pas magnifique ! » par-là ou bien encore des « Waouh ! Vous avez vu cette superbe queue blanche » etc. Elle prend à cœur son boulot et ça s’entend. Enfin bon ça se comprend, car le spectacle auquel on assiste est vraiment impressionnant. Nous pouvons observer à loisir plusieurs groupes de baleines à bosse qui se meuvent pleines d’aisance, malgré un poids tonal conséquent, dans cette immensité bleue. Parfois, un baleineau fait son apparition, toujours collé à un adulte (qui n’est autre que sa môman), avant de replonger avec grâce dans le monde du silence. Et nous prenons ainsi plaisir à chercher avec des yeux pleins d’espoir la prochaine baleine qui va émerger. Un jet d’eau au loin, une masse informe en mouvement sous l’eau et c’est tous nos sens qui se mettent aux aguets. Au loin et derrière les feux d’artifices d’eau jaillissant des évents, une baleine saute hors de l’eau et retombe dans un retentissant "splash". On se croirait presque à bord de La Calypso, un bonnet rouge vissé sur la tête et le sentiment d’assister à une scène magique de la vie sauvage. De retour sur la terre ferme en tout début d’après-midi, nous restons nous relaxer à Freo jusqu’à la fin de la journée avant de retourner conquis dans nos pénates. Le retour dans le monde du travail après cet intermède marin risque d’être dur.


On dirait que la chaleur australienne a fait rétrécir Rodie

La classe australienne : la limousine 4x4. "Ils mènent des vies de milliardaiiiiiiire alors que les pauuuvres mènent des vies de cons. Aujourd'hui les pauvres ont gagnés. Alors crêve, ordure !"














Once upon a time in the west (27-31 oct. 2010)


Perth, Western  Australia State, Australia


Si la ruée vers l’or qui a accompagné la découverte de l’outback australien à la fin du XIXème siècle par des explorateurs anglais comme Paddy Hannan devait avoir un symbole, ce serait bien la ville de Kalgoorlie. La région abrite de nombreuses mines d’or dont certaines sont encore en activité mais "Kal" (comme disent les autochtones) reste largement le plus gros producteur d’or de toute l’Australie et fait figure d’Eldorado en la matière.  Cependant, nous constatons bien évidemment que cela n’a plus rien à voir du tout avec l’image typique que tout le monde se fait du gars qui cherche de l’or : campé debout dans une rivière, le dos courbé, l’eau jusqu’aux genoux, les yeux rivés sur le tamis fait maison qu’il secoue délicatement pour mieux discerner les rares traces d’or à la lueur d’un soleil éclatant. N’en déplaise aux romantiques et aux doux rêveurs, ce sont bien à bord d’énormes engins motorisés, de plusieurs centaines de tonnes qui creusent et creusent encore, que les mineurs, avides de conquêtes et de fortunes, partent sous un soleil souverain à la recherche des mystérieuses pépites d’or (tututu wahahaha)… En clair, le précieux minerai est extrait essentiellement sur l’imposant site de Super Pit situé sur l’arc extérieur de la ville et qui s’étend sur 3,8km de long, 1,35km de large et 500m de profondeur ! 


Le site de Super Pit !
 Nous nous laissons tenter par ce qui est sensé être une exposition sur la recherche d’or mais qui se révèle, une fois sur place, être la foire géante au matériel minier. Un sacré business se déroule ici et c’est tout naturellement que nous déambulons dans l’exposition où nous pouvons nous arrêter de temps à autres, selon l’envie, devant un stand afin d’écouter les professionnels vanter les mérites de leurs nouveaux produits. A ceci près que l’on se croirait tout droit sorti de l’émission Strip-tease. Des filles avec des mini-jupes plus courtes les unes que les autres font la promotion d’engins en tout genre et de foreuses géantes qui rendraient ridicules celles de Bruce Willis dans Armageddon. Des moustachus en chemises à carreaux et chapeaux de cow-boy à la JR, des jeunes commerciaux le sourire aux lèvres et les poches bourrées de pesos, des gros bras tatoués de partout et arborant fièrement leur T-shirt d’ACDC ainsi que des aficionados du lingot venant de tout horizon complètent le tableau. Bref, tout le gratin australien du secteur minier s’est  donné rendez-vous pour cette occasion. Nous nous demandons bien ce que nous sommes venus faire dans ce lieu aux antipodes de ce que nous imaginions. On a vraiment l’air de fameux gullies*. Cependant, nous devenons opportunistes quand nous apprenons que la bouffe et la boisson sont à volonté. Une seconde après, nous nous baffrons allègrement de sandwichs saucisses-oignons-moutarde agrémentés par un délicieux café ou chocolat au lait et du coca bien frais, tout en admirant le spectacle qui est offert à nos yeux ravis. Après tout, ce n’était pas une si mauvaise idée!


  Le mythe de Sisyphe à la sauce cailloux.



 L’or à la pelle

 Au niveau touristique, la ville entière est dédiée, tenez-vous bien, au glorieux passé des chercheurs d’or (Bizarre... Vous avez dit bizarre ? Comme c’est étrange). De nombreuses carrières, fermées aujourd’hui, peuvent être visitées. Il existe même un bar qui se situe au-dessus d’un de ces anciens gisements. A une époque pas si lointaine, les chercheurs d’or, remontant de la mine après une journée de boulot éreintante, se trouvaient directement à l’intérieur du bar pour se payer une bonne bière bien fraiche ! D’ailleurs, la star locale Slim Dusty, chanteur ès country australienne malheureusement décédé aujourd’hui, s’est fait (inter)nationalement connaître avec son fameux tube "The pub with no beer" qui prône, à grands coups de phrases interminables, l’absurdité sans nom d’un bar sans alcool ! Et ça se comprend vu la température ambiante et l’atmosphère lourde qui règne à Kal. C’est simple, depuis notre arrivée au pays des kangourous, il n’a jamais fait aussi chaud et moite qu’ici, ce qui a le fâcheux inconvénient de nous faire suer invariablement à grosses gouttes. Après avoir fait le tour de ce qu’il y avait à voir dans le domaine historique, nous reprenons la route sous une tempête "tropicale" grandissante. Tout devient vite orage et éclairs partout, soleil nulle part (!). Le vent soulève de grandes bourrasques de poussières qui viennent se mêler à la pluie battante. Nous avons un aperçu grandeur nature de ce qui nous attend sûrement lorsque nous traverserons le Nord de l’Australie, en pleine saison des pluies, en début d’année prochaine. 

Au fur et à mesure que nous avançons sur la route qui mène à Perth, nous quittons les paysages désertiques dignes des westerns d’autrefois pour un paysage plus vallonné. Seule exception notable : une formation rocheuse, creusée par la pluie au cours des millénaires et ressemblant à s’y méprendre à une gigantesque vague de pierre (lui valant le nom de Wave Rock) de plus de 120m de long et 11m de haut ! La civilisation réapparait avec des maisons situées dans les hauteurs comme dans certaines régions californiennes. En outre, le coin abrite de nombreuses exploitations agricoles propices pour un job saisonnier. Etant plus que temps de trouver un taf pour se renflouer, nous tentons notre chance dans une exploitation qui nous semble prometteuse. Le fermier nous indique cependant qu’il n’a pas de travail pour nous car son exploitation est trop petite mais qu’il connait d’autres fermiers qui seraient susceptibles de nous embaucher. Les noms qu’ils nous donnent sont tous à consonances italiennes : Reinoldi, les frères Cassotti… Ce qui à l’air de confirmer les dires comme quoi Perth et ses alentours sont la région d’Australie la plus européanisée. Les adresses en poche, nous filons à l’exploitation la plus proche avec un mélange d’excitation et d’appréhension. L’homme que nous rencontrons se nomme Angelo Ghilanducci et possède une des plus grosses exploitations du coin où les vergers (pommes, pèches, figues etc.) s’étendent à pertes de vue. Nous nous pointons donc avec nos gueules tout enfarinées dans sa grange pendant qu’il déjeune pour lui demander du travail, en ce vendredi midi. Angelo, assis devant son journal ouvert en grand sur la table, nous regarde d’en bas avec des yeux pesants. A peine arrivons-nous devant lui qu’un dialogue bref, concis et sans détours s’engagent alors :
            « Vous cherchez du boulot les gars.
Il affirmait et ne nous posait pas une question.
            - Oui, on voyage et …
            - Très bien, nous coupe t-il.
Angelo attrape alors la visière de sa casquette, la soulève légèrement pour se gratter le front de la même main, la repose sur son crâne, échange quelques mots avec sa femme assise face à lui et est pris d’un rire gras. Puis il tourne à nouveau son regard lourd sur nous, dépourvu de toute trace d’hilarité, et affirme de la même façon qu’il l’avait fait avant :
            - Alors 7h précises lundi matin.
            - 7h ?
            - Précises.
            -  D’accord, finissons-nous par lâcher, stupéfait d’être embauchés si rapidement, sans plus de formalisme. Vous pensez qu’il y’a du travail pour combien de temps ?
            - Ca dépend de vous. Si vous êtes bons, vous resterez le temps que ça prendra. Si vous n’êtes pas bons…
Et il haussa les épaules laissant sa phrase en suspens.
-  C’est parfait, fit-on amusés par son langage aussi direct et franc qu’une mitraillette Thompson à chargeur tambour.
- On se voit lundi alors, conclut-il. Et il reposa les yeux sur son journal, comme si ça demandait trop d’effort de les lever jusqu’à nous, en disant : Vous pouvez prendre une pomme si vous voulez.
            - Me … Merci, ça ira, dit-on simplement avant de partir tranquillement vers notre van, un travail en poche et l’impression d’avoir été confronté à Toni Soprano, en plus vieux et plus … fermier. »
        

 Lézard Blue tongue (à langue bleue)


Another one bites the dust !

Wave Rock



 Où est Charlie sachant qu’il a revêtu son costume d’alpaga ? Sauras-tu le retrouver à temps ?


    Nous venons donc de passer avec succès le plus cours entretien d’embauche pour du taf de notre vie ! Et c’est avec joie que nous nous dirigeons vers Perth pour passer le week-end en toute décontraction. D’autant plus que nous connaissons du monde pour nous loger là-bas… Les rencontrent que nous faisons lors de voyages s’avèrent très souvent enrichissantes et peuvent dans certains cas devenir proprement incroyables. Ainsi, c’est en faisant un trek en Islande l’été dernier que Quentin a été pris à en stop, aux abords de la capitale Reykjavik, par un dénommé Reynir avec lequel il a très vite sympathisé. Il s’est alors trouvé que cet islandais pur souche était étudiant en production design à Perth jusqu’à début décembre 2010 ! Il n’en fallu pas plus pour s’échanger les numéros et de se donner rendez-vous à l’autre bout du globe quelques mois plus tard… Lorsque nous arrivons à Perth, ville d’1,2 millions d’habitants, nous comprenons tout de suite que c’est l’endroit où il fait le plus bon vivre d’après tous les lieux que nous avons traversés. La ville est bordée par la mer et longée par un fleuve, la Swan River, que l’on peut traverser en ferry pour entrer dans le centre-ville. Ce dernier, tout en gardant une architecture australienne traditionnelle, possède un style plus européen à nos yeux, fait de rues piétonnes en son centre. De grands parcs verdoyant où l’on peut se détendre ("barbecues every days, driving fancy cars". A part que dans notre cas, on mange des pâtes et qu’on conduit un van) et apprécier la vue, dont le magnifique Kings Park surplombant le centre-ville, entourent et parsèment Perth. Nous visitons les quartiers de la ville paisiblement en van et passons notamment, au détour d’un virage, par une petite colline nommée Inglewood comme à Los Angeles (West coast, niggas ! On passe le bonjour à Dre et Jules Winfield). On en profite également pour observer une sculpture de la figure impossible du triangle de Penrose. Ce défi repose sur une illusion d’optique qui ne permet de voir le triangle se fermer qu’à partir d’un seul endroit. Les alentours ne sont pas en reste non plus. La périphérie englobe des petites villes situées le long de la mer pour la plupart. Là, de grands palmiers s’alignent indéfiniment, semble-t-il, à la suite des plages au sable blanc qui bordent l’azur de l’Océan Indien. A Fremantle, à 40 kms de Perth, nous allons nous promener dans un grand marché qui longe les quais du port où de vieux navires ont jeté l’ancre.


Perth le long du Swan River


Hammer time !


 
Vue sur  Perth depuis Kings Park


 Des parcs à profusion

 Ibis Sacré


Moment détente face à l’Océan Indien


 
C'est un fameux trois mâts.

Hissez la grande voile bande de moule-à-gaufres, bachi-bouzouks, ectoplasmes, tonnerre de Brest !


Centre-ville de Perth de nuit


            Reynir habite dans une maison au sud de Perth avec deux colocataires norvégiens, Karl et Jonas, qui font partis de la même classe que lui. Ils sont en train de terminer leur projet de fin d’étude qu’ils présenteront le mardi suivant. Reynir, notamment, à créé un prototype de kit de survie cylindrique à mettre derrière sa moto de neige. Quoi de plus normal pour un habitant d’un pays aussi haut latitudinalement ! Nous sommes un peu gênés car nous ne voulons surtout pas déranger. Cependant cela ne leur pose aucun problème et l’accueil excellent que nous réservent ces trois vikings chez eux est du genre "Mi casa es su casa". Nous avons l’impression instantanément d’être comme chez nous. Ca fait énormément plaisir surtout que nous n’avions plus passé de soirées sous un toit et dormi dans un vrai lit depuis plus d’un mois. On ne compte plus non plus le temps depuis lequel on a pu disputer un petit match de foot sur console (héhé) ! Un petit week-end entre potes sous un grand soleil est donc parfait pour se remettre d’aplomb avant de commencer le dur labeur d’un travail agricole qui nous attend au sein de Karragullen, commune aux agréables sonorités bretonnes.


 Reynir et Quentin


Ca travail dur sur son projet !



Triangle de Penrose, illusion d'optique vue sous le bon angle



Triangle de Penrose, vu hors du point d'illusion


* Voir le fameux film Blood Freak ou à défaut l’extrait sur Nanarland