mardi

Still (10-21 fév. 2011)

 Sydney, New South Wales State, Australia

Gold Coast



            La Côte Est et plus particulièrement la Gold Coast est l’une des régions, sinon la région, la plus peuplée d’Australie. Cela faisait tellement de temps que nous voyagions dans des régions où il y a peu d’habitants que le contraste auquel nous sommes confrontés maintenant nous surprend fortement. En fait, nous avons oublié ce qu’était que vivre dans des lieux fortement urbanisés. Tellement urbanisés que nous sommes légèrement déçus par cette Gold Coast pourtant très réputée. Les vagues et l’eau claire du Pacifique font le régal des surfeurs mais les villes et les bâtiments agglutinés le long des plages donnent un caractère artificiel et balnéaire qui ne nous sied guère (l’exemple le plus frappant étant la ville de Surfer Paradise). Nous sommes loin du caractère sauvage de la Côte Ouest. De plus, chercher un endroit où pioncer est ici vraiment galère. Il y a trop de monde partout et peu de zones de repos. Les villes étant collées les unes aux autres, c’est comme si nous cherchions un lieu où dormir en pleine ville. Dès le lendemain, nous décidons de quitter cet endroit trop bondé pour les espaces montagneux des forêts pluvieuses situées plus dans les terres. Notre choix s’avère être le bon. De magnifiques montagnes verdoyantes s’offrent à nos yeux ébahis. Nous grimpons les cols pour faire le tour des parcs nationaux qu’abritent ces lieux. Dans des montées assez raides (des pentes allant jusqu’à 20% d’inclinaison), le van lutte, plie sous l’effort mais ne rompt pas. Le jeu en vaut la chandelle : l’horizon s’étend jusqu’à perte de vue et nous pouvons observer les vallées serpentées par les rivières et au-delà l’Océan Pacifique. 

 Surfer Paradise, sa plage, ses 4x4 et ses buildings.

            Le premier parc que nous visitons est le Springbrook National Park qui se trouve sur les restes d’un ancien volcan, vieux de plus de 20 millions d’années, qui a façonné l’environnement par ses irruptions. Là encore, le paysage offre de nombreuses vues (lookout) impressionnantes sur les alentours. Nous en profitons pour faire un peu de randonnée. Quel plaisir de se promener en forêt dans une végétation aussi luxuriante ! Nous apprécions véritablement ces lieux paisibles, silencieux, que seul les chants des oiseaux viennent troubler. Ici tout est calme, luxe et volupté pour reprendre l’expression du poète. Qu’importe si les toiles d’araignées se collent un peu partout sur nous ou si les sangsues se collent sur nos pieds et nos jambes pour nous pomper un peu de sang (le problème c’est juste qu’on ne les sent pas et que leur anticoagulant est pour le moins efficace !). L’ambiance "jungle profonde" nous entoure et nous nous enfonçons, seuls, avec plaisir dans cette immensité verte à la manière d’un Indiana Jones dans Le temple maudit…. Nous poursuivons notre chemin pour nous rendre au Lamington National Park. Cet espace montagneux fait parti de l’héritage mondial de l’UNESCO de part son précieux rôle écologique. De multiples randonnées de plus ou moins longues haleines sont possibles. Le parc étant divisé principalement en deux grandes zones distinctes : les Green Mountains et Binna Burra, nous décidons de passer plusieurs jours dans les parages. Les tracks que nous faisons sont tous excellents. Nous traversons des lieux particulièrement beaux. Au cours de nos marches, la végétation change. De grands arbres recouverts de lianes font place à des forêts d’hêtres millénaires, appelés Antarctic Beeches du fait qu’on ait retrouvé des traces de leur présence en Antarctique à l’époque où ce continent était encore rattaché à l’Australie. De nombreux cours d’eau, des magnifiques cascades et chutes d’eau parsèment les différents parcours. Parfois, la pluie s’invite en versant des trombes d’eau de courtes durées mais bien intense. Le terme de forêts pluvieuses prend ici tout son sens. Nous apprécions tellement les lieux que c’est un peu à regret que nous devons les quitter. 

L'escalier de la forêt

 Sangsue très attachante, nourrie au sang français, svp.

 Orchidée endémique du Queensland



Twin Falls

Epiphyte ayant fait sa place sur un tronc et remplacé complètement ce qu'il y avait au-dessus

Racines d'un figuier étrangleur autour d'un tronc d'arbre déjà en place (l'arbre est à la base épiphyte, posé sur une branche)

Totoro, totoooooro.



Pause déjeuner en forêt


 Ecrevisse bleue de forêt, d'eau douce et particulièrement belliqueuse la petite.


            Le dernier soir que nous passons aux Green Mountains, nous avons besoin d’électricité pour recharger la batterie de l’ordinateur portable. N’ayant pas de prise sous la main, nous tentons une excursion dans le Hotel Resort du parc en nous faisant passer pour des clients de l’hôtel. Pendant que la batterie charge, nous sommes alpagués par une chinoise qui nous met au défi de la battre au ping-pong, sport roi dans son pays. Après plusieurs tentatives, nous l’emportons finalement. Nous sympathisons très vite avec cette dynamique asiatique et nous passons la soirée avec elle. Comme il se trouve que c’est elle qui gère l’hôtel en tant que réceptionniste (elle parle couramment le chinois, le japonais, l’anglais et se met au français !) et que le patron n’est pas là, elle nous ouvre toutes grandes les portes de la demeure. Nous ne demandons rien mais Jian Ying (ou bien Jane lorsque son prénom est anglicisé) tient à nous faire plaisir. Nous profitons alors pleinement du billard, du salon, des bières et cerise sur le gâteau du spa, le tout pour pas un rond au lieu des 300 dollars de prévu par tête de pipe ! Que c’est bon de se délasser dans un jacuzzi en plein air après une longue journée de marche et de regarder tranquillement les étoiles tout en discutant de tout et de rien. Ah là là ! la vie est pleine de surprises : on part à l’aveuglette recharger son portable et on se retrouve quelques temps plus tard dans un jacuzzi, les doigts de pieds en éventail en train de discuter le bout de gras avec une chinoise ! Après cet agréable moment de détente, nous continuons notre route en se disant qu’on laisserait bien une seconde chance à la Gold Coast. Peut-être que les coins situés plus au Sud seront plus agréables.


spa : société protectrice des apathiques

             A peine revenus au bord de la Côte Est que les ennuis commencent. Nous nous apercevons au bout de quelques heures que Guillaume a perdu sa sacoche, très certainement sur le parking où nous faisions nos courses. Le problème majeur est que tous ses papiers sont à l’intérieur ainsi que les différentes cartes bancaires et qu’il n’a pas de photocopies de son passeport ! S’en suivent différents allers-retours entre les Etats du Queensland et du New South Wales, une inspection au peigne fin des lieux de la perte avec interrogatoire des différents magasins, une visite au commissariat et quelques sueurs froides. Après un jour et demi, la sacoche est finalement retrouvée par une employée du supermarché Coles qui a eu la brillante idée de regarder à l’intérieur pour voir si nous avions un numéro de portable noté quelque part. Bien lui en a pris et c’est avec soulagement que nous n’irons pas faire un tour au consulat français de Sydney pour remplir tout un tas de paperasses… Tout juste sommes nous sortis de cette histoire que la roue avant gauche du van fait un bruit inquiétant, un clac-clac qui n’augure rien de bon. Nous vérifions mais ne voyons rien d’anormal. Pourtant dès que nous commençons à rouler, la roue continue à produire son horrible son. Parfois, le véhicule tangue vers la droite sans que nous le voulions ou bien les freins ont du mal à répondre. Pas le choix, nous devons au plus vite atteindre un garage qui nous indiquera ce qui cloche vraiment. C’est aux abords de la ville de Byron Bay que nous le trouvons. C’est un garage de taille respectable, trois employés plus le patron, et l’ambiance semble être agréable. Après inspection du van, le chef (imitateur chevronné de Bob Dylan) nous indique que nous avons eu une chance énorme d’être arrivés ici avec l’engin en un seul morceau. La roue avant gauche tient à peine, certains rouages à l’intérieur sont cassés et une pièce qui à l’origine devait être un parfait cylindre est par endroits un simple cercle ! Le van ne peut plus rouler dans ces conditions et il est nécessaire de le réparer tout de suite. Nous acceptons, bien évidemment. Le véhicule sera réparer dans l’après-midi et le tout nous coûtera à peu près 200 dollars, ce qui reste raisonnable. 


            Au lieu de rester planter là à poireauter toute la journée, nous partons rejoindre le centre-ville de Byron Bay et la plage qui se trouve juste à côté. Cette ville est l’une des destinations favorites des jeunes en vacances. C’est vrai que cet endroit a de nombreuses qualités à revendre : le farniente imprègne les lieux, happy hour à partir de 16h30, l’eau est d’un bleu-clair saisissant, les vagues sont au rendez-vous, la plage est de sables fins, les jolies filles abondent sur la plage et portent des bikinis qui tiennent par on sait quel miracle (hum hum, on s’égare pas un peu là ?)… Bref, le lieu est appréciable. Nous partons prendre quelques vagues bien puissantes et qui nous rabattent indubitablement plusieurs dizaines de mètres sur la gauche à cause du courant fort qui circule ici. A peine sortis de l’eau, qu’une partie de foot est improvisée sur la plage. Anglais, canadien, irlandais(e)s, allemand(e)s, français, personne ne se connait vraiment mais ça n’empêche pas de bien se marrer. La journée passe tellement vite qu’on doit accélérer le pas sur le chemin du retour pour arriver au garage avant qu’il ne ferme. Là, un nouveau problème nous attend bien au chaud. Le chef du garage nous apprend qu’ils ne peuvent réparer la roue car une autre pièce est cassée également. Ils ne pourront réparer que demain lorsque la pièce sera là. Nous n’avons guère le choix là encore. Il nous propose de sortir le van du garage, ayant compris qu’on dormait dedans, et de le laisser sur le parking derrière le bâtiment. Cela ne leur pose pas de problèmes et nous voilà passant la nuit sur un van à trois roues derrière un garage dans un lieu assez glauque. Au moins, la cafétéria d’à côté nous donne les restes de la journée. Au menu : snacks, friands à la saucisse, galette de poisson pané et une pastèque. Cela fera parfaitement l’affaire. 

 Byron Bay

 La roue de l'infortune
            Le lendemain, la réparation prend plus de temps que prévu. Des boulons sont à changer, les freins à graisser, les roulements à remettre en place, etc. A 13h, le van est fin prêt. Le chef nous annonce que malheureusement le prix sera plus cher car il y a eu une pièce en plus à changer et le temps de main d’œuvre a été plus long. Nous nous en doutions un peu. Néanmoins le prix augmente considérablement et passe à 480 dollars. Bon, on rentre toujours dans nos frais mais les problèmes liés au van se font de plus en plus fréquents. Espérons que ce soit la dernière fois même si un gros doute est permis !  Après avoir passé 24h dans la vie d’un garage australien (expérience intéressante tout de même), nous décidons de prendre l’air du large, direction Cape Byron, point le plus à l’Est de l’Australie. Le nom du lieu a été donné par Cook en hommage au grand-père du poète Lord Byron qui était un fameux navigateur. Ce cap, pointe de terre élevée s’avance dans l’océan, offre une vue impressionnante et magnifique presqu’à 360°. Un phare trône ici depuis plus d’un siècle pour guider les bateaux de son halo lumineux.


 Le nouvel album de faith plus one, bientôt dans les bacs

            Nous quittons ces hauteurs pour nous diriger ensuite vers la plus grosse ville australienne, capitale économique : Sydney. Avec près de quatre millions et demi d’habitants, elle regroupe un cinquième de la population du pays. Nous nous levons aux aurores pour visiter la ville ce qui n’empêche pas d’être pris dans les embouteillages au petit matin. Il y a des routes partout, un grand nombre de voies, des bretelles d’accès qui s’emmêlent, des tunnels, des péages et des ponts dans tous les sens. Nous nous perdons facilement en arrivant en van dans Sydney. Nous nous garons donc tant bien que mal à distance du centre-ville et parcourons les derniers kilomètres à pied. Le centre-ville ressemble de près à celui de Melbourne : buildings et centres commerciaux énormes, rues en quadrillages, artistes de rue, métro aérien posé sur pylônes, etc. Nous ne nous y attardons pas, nous voulons voir le principal monument de la ville : l’Opéra de Sydney, symbole de l’Australie tout entière. Nous traversons les immenses jardins royaux, où quelques chauves-souris ont établies résidence, pour arriver sur les rives d’un des ports de la ville. Celle-ci est posée directement au contact de l’eau et un grand nombre de quais s’avancent dans l’Océan pacifique sur ses bords. Au loin, nous apercevons l’Opéra, comme un vaisseau accosté, voiles latines au vent et pourtant immobile. Il apparait devant un immense pont d’acier qui surplombe le port. La vue est grandiose. Nous entrons à l’intérieur du monument quelques instants et profitons de la vue qu’offre la ville depuis son parvis. Nous nous baladons ensuite dans les rues de la ville avant de reprendre le van pour nous diriger vers une des plages les plus réputées de Sydney : Bondi Beach. C’est sous un ciel orageux que nous y arrivons. Il s’agit d’une grande plage de sable, en arc de cercle, touchant directement la ville. Plusieurs surfeurs sont dans l’eau, des kayakistes aussi. Les villes australiennes ont ceci de particulier qu’elles sont jeunes et, par conséquent, sans histoire ou presque. Les monuments, les places célèbres et remarquables sont peu nombreuses. Aussi, après avoir profité de ce que Sydney pouvait nous offrir, nous quittons les lieux. La destination suivante est la capitale administrative du pays : Canberra.

Arrivée dans Sydney par le Harbour Bridge

Métro aérien

 Opera House de Sydney

 "Là, c'est moi devant l'opéra"
 
Centre-ville de Sydney

Tortuga (30 janv. – 09 fév. 2011)

 
 Brisbane, Queensland State, Australia

 
 Capricorn coast

     A peine avons-nous mis les voiles que nous apercevons une tortue d’eau douce perdue au beau milieu de la route et n’osant plus bouger. Toujours prêts à répandre le Bien, Dons Quichottes des temps modernes, nous nous en allons à la rescousse du pauvre chélonien. Un couple de motards a la même idée que nous et fait également demi-tour. Nous arrivons en même temps sur les lieux pour aider cette malheureuse tortue égarée (mais contrairement à d’autres chanceux, Tortue Géniale ne se pointera pas pour nous faire don du nuage magique !). Le reptile est une espèce endémique du nord de l’Australie qui a la particularité de posséder un très long cou. Alors dans une scène façon de 30 millions d’amis, nous remettons la tortue aux motards pour qu’ils la posent un peu plus loin dans un cours d’eau (creek). Ca fait plaisir de voir gens soucieux de leur patrimoine faunistique… Ce bref intermède zoologique passé, nous poursuivons notre route à travers les plaines arides du centre australien, les kilomètres fondants comme neige au soleil, à bord de notre engin paré d’une seconde jeunesse. Enfin, nous arrivons aux Devils Marbles situés à quelques centaines de bornes au nord d’Alice Springs.  La quiétude qui règne sur les lieux n’a d’égale que la bizarrerie du paysage. De larges sandwichs de pierres, des cairns démesurés, des empilements invraisemblables sont éboulés au milieu de la plaine. Il n’y a là que des herbes, en parties brulées, et ces rocs rouges. Vert, jaune, rouge, c’est ça. Nous faisons le tour des billes (euphémisme délicat, remarquez comme c’est beau), grimpons sur plusieurs tas afin de contempler la vue. Ce n’est pas souvent qu’on peut avoir une vue en hauteur sur de vastes plaines sans faire intervenir les lois physiques de la portance ou sans se coller des plumes sur les bras (hein Dédalle ?!). Ce sera la dernière vue des zones désertiques du centre de l’Australie dont nous pourrons jouir car nous faisons route, après cette pause, vers la Côte Est.

 
Tortue au long cou

 Le van avec sa superbe moustiquaire en guise de chemise de nuit. Affriolant non?

 Une partie des Devils Marbles


 Enchevêtrements de billes...


     Pour se rendre sur la côte que borde le Pacifique à partir du centre de l’Australie, les pionniers anglais ne se sont pas trop posés de questions. Paf ! une ligne droite à travers le paysage et qu’importe le relief, la topologie des lieux ou le type de végétation à traverser. Si bien que nous voilà en train de traverser une zone fréquemment soumise aux tempêtes et nous n’y coupons pas, dernier cadeau de notre passage dans le Northern Territory. Nous entrons dans le Queensland, inondés (on a le droit de rire de tout non. Et puis, un brin d’humour ne fait jamais de mal !) de plaisir après tout le bien dont on nous a fait part sur cet Etat. De vastes plaines herbeuses se dressent à perte de vue tout autour de nous. Ce nouveau paysage verdoyant éveille le plaisir des yeux aussi bien que celui de l’odorat. De nombreuses senteurs et parfums, ravissant même les nez les moins délicats, s’offrent à nous. Cependant, les routes sont, pour la majeure partie, fortement abîmées par les inondations récentes. Tout au long du trajet, nous pouvons voir de nombreux travaux de rénovations. A mesure que nous nous approchons de la côte, les voix ferrées se multiplient. Il faut dire aussi que l’exploitation du charbon ici est extrêmement prolifique. Une centaine de millions de tonnes est extraite tous les ans dans cette région de l’Australie (au milieu de toute cette houille, ils sont immergés jusqu’aux c…). Cet hydrocarbure, servant comme carburant, est ensuite acheminé par des trains de plus d’un kilomètre et demi de long ! Les trajets de villes en villes étant conséquents dans ce gigantesque pays, des questions de culture générale sont inscrites sur des panneaux de signalisation suivies par les réponses quelques kilomètres plus loin pour maintenir éveillé le conducteur. C’est plutôt amusant et ça change des nombreux autres panneaux qui essayent de te garder les yeux ouverts en jouant sur le danger et la peur. Nous atteignons finalement les côtes du Pacifique par la ville de Rockhampton et il nous tarde de comparer l’Océan Indien de la côte ouest avec ce nouvel océan où nous ne nous sommes pour l’instant encore jamais baignés. Nous décidons de ne pas nous attarder dans cette bourgade où, disons-le, il n’y a rien à faire. Nous préparons notre plan d’attaque de notre descente jusqu’à Melbourne et nous décollons. Direction tout d’abord à Agnès Water et la « ville de 1770 » par la Capricorn coast. Etrange dénomination, mais riche de significations. C’est ici même, dans ce village côtier qu’en 1770 le lieutenant James Cook, explorateur au service de Sa Majesté, jeta l’ancre, accosta et foula le sol australien (dans cet ordre-là) pour la première fois. C’est-à-dire, vous l’aurez noté vous-même, exactement 200 ans précisément avant la mort de Jimi Hendrix, 217 ans avant notre naissance, 240 ans avant la mort de Ronnie James Dio et donc 240 ans aussi avant la disparition de Walter Frederick Morrison qui transfigura le premier des plats à tartes en frisbee, 228 ans avant que la France ne soit championne du monde de football et bien des années après que le royaume de Logres ne trouve un roi qui sache réunir ses chevaliers pour la quête noble d’une destinée commune (dans le désordre cette fois). Nous parcourons la côte, nous nous baignons dans ces eaux historiques. Ces endroits ont été peuplés bien avant les régions de l’Ouest et ont perdu le caractère sauvage si présent de l’autre côté de l’île. Nous allons également goûter le Pacifique à Agnès Water, spot de surf voisin de « 1770 ». Ses eaux sont très agitées, plus froides et plus salées que celles de l’Océan indien. Nous nous reposons deux jours à cet endroit de la côte avant de poursuivre notre trajet. Prochaine étape : la ville de Bundaberg.


 James Cook a jeté l'ancre dans le coin

     Comme les précédents lieux visités le long de la Côte Est, le paysage côtier de Bundaberg et de ses environs à des accents de piraterie. Et ce n’est pas juste parce que dans cette ville le rhum coule à flot que nous y pensons. La végétation luxuriante, les longues plages de sables fins bordées par de nombreux palmiers ainsi que les multiples escarpements rocheux ajoutent une dimension pittoresque propice à toutes les rêveries flibustières possibles et inimaginables. Nous traversons à pied un morceau de terre entouré par un bras de mer et aussitôt nous sommes transportés sur L’île aux trésors, poursuivis par l’intraitable Long John Silver. Une anse calme et peu profonde en vue et déjà nous imaginons Sir Henry Morgan ou Edward Teach, le vil Barbenoire, retenus ici durant plusieurs jours au mouillage par des vents contraires. Parmi ces nombreuses plages, l’une d’entre elles retient particulièrement notre attention. Il s’agit de la plage de Mon repos (oui oui dans la langue de Molière même ici chez les kangourous) qui abrite le plus grand site de ponte d’œufs de tortues de mer de tout l’Hémisphère Sud !! Chaque année, des centaines de ces animaux viennent une à deux fois par an sur cette plage pour pondre leurs œufs. Le fait étonnant, c’est que ces tortues reviennent sur cette plage, lieu de leur naissance, seulement après 30 ans passés dans l’océan (âge nécessaire pour atteindre la maturité sexuelle) sans que l’on sache ce qu’elles font entre-temps. Pas plus, nous ne savons comment elles arrivent à retrouver leur chemin sans se tromper. Nous nous y rendons donc, à tout hasard, au cas où nous aurions la chance de voir à l’œuvre ces intrigants reptiles. Une fois sur place, nous voyons le long de la plage des groupes de deux personnes s’afférant à creuser des trous là où le sable est en bordure de la végétation. Après discutions avec certains d’entre eux, il s’agit de volontaires qui passent quelques semaines à surveiller les pontes des tortues et à faire en sorte que le maximum de bébés tortues gagnent l’océan. Il faut dire aussi que le taux de survie d’une tortue entre sa naissance et son passage à l’âge adulte est de 1/1000. Entre l’œuf qui n’éclot pas pour diverses raisons physico-chimiques, la tortue qui n’arrive pas à sortir du nid et qui meurt de faim, celle mangée par les crabes ou les oiseaux avant d’avoir atteint la mer et celle avalée par les requins et autres gros poissons une fois dans l’eau, le devenir d’une jeune tortue est bien incertain car sa vie est soumise à mille dangers. C’est bien simple, parmi la centaine d’œufs que pond en moyenne une tortue adulte, la probabilité qu’un seul de ces œufs n’atteignent le stade adulte est d’environ de 10%. C’est pour ça que ces bénévoles mettent autant de soin à faire du suivi d’espèces, comptabiliser le nombre de tortues venant pondre par jour, vérifier les nids etc. Il ne faut pas néanmoins oublier ou minimiser les questions d’ordres écologiques que ce genre de pratique anthropique amène.

 

 

 
     Là encore, la chance nous sourit une fois de plus. Nous pouvons observer une tortue adulte (de l’espèce des Loggerhead) repartir dans la mer après avoir déposée ses œufs sur la grève. De même, nous avons l’occasion de voir de près des œufs d’autres tortues aptes à l’éclosion. Le mieux reste cependant à venir. Nous nous dirigeons vers un nid où les œufs ont éclos dans la matinée. Il reste à l’intérieur du trou une trentaine de tortues qu’il faut se dépêcher de mettre à l’eau. Le responsable qui s’occupe du nid nous prend alors au dépourvu, nous pose cinq tortues dans les mains et nous demande de les aider. Deux secondes plus tard, nous nous retrouvons à courir vers les vagues avec ces quelques tortues que nous nous empressons de déposer à quelques mètres du rivage. Après deux allers-retours, toutes les tortues rescapées sont au bord de l’eau. Avec leurs palmes comme propulseurs, elles foncent (aussi vite que faire ce peut !) vers leur but commun. Il est à la fois marrant et surprenant de voir à quel point ces animaux, nés quelques heures à peine auparavant, ont cette capacité innée de savoir ce qu’ils font et où ils vont sans l’ombre d’une hésitation. C’est peut-être de cela que la tortue tire sa légendaire sagesse. En tout cas, nous sommes heureux d’avoir assisté à ce spectacle et d’en avoir été également des acteurs actifs… Bundaberg offre aussi des sites de snorkelling pour l’observation de la Grande Barrière de corail qui s’étend du nord du Queensland, où elle est accessible que par bateau jusqu’à la limite sud qu’est Bundaberg, où la barrière est très près de la côte. Nous tentons une plongée mais en vain. Il y a beaucoup trop de vagues qui brassent le fond et on ne voit pas à plus de 10cm devant nous. Heureusement que nous avons pu en profiter de tout notre saoul sur la Côte Ouest. 

 Tortue Loggerhead

 Œufs qui n'ont pu éclorent
 "La dernière à l'eau est une poule mouillée!! "




     Nous reprenons la route pour nous rendre à Brisbane. La région située aux alentours de Bundaberg est parsemée de champs de cannes à sucre alignées en rangs serrés, prêts à fermenter le rhum le plus répandu d’Australie qui porte justement le nom de cette ville. Des rails de voies ferrées entourent tous ces champs pour récolter la canne à sucre et la ramener dans les distilleries. Un business énorme est drainé ici. Autrement, plus on roule vers le Sud, plus la circulation est encombrée. Cela faisait longtemps qu’on avait connu pareil densité. Il devient de plus en plus difficile de trouver un endroit paisible (et légal) où dormir. Finalement, nous arrivons à Brisbane, ville de plus d’un million et demi d’habitants. Elle nous apparait très rapidement bien sympathique. D’ordinaire, nous ne sommes pas très féru des grandes métropoles australiennes car elles n’ont pas de passé et semblent par conséquent ne posséder aucune âme qui leur est propre. Pourtant, cela ne semble pas être le cas de Brisbane. Bien sûr, il y a toujours des monuments religieux ou politiques qui sont une imitation vaguement ressemblante et un peu grossière des originaux européens, comme s’il suffisait de construire un réplicat d’un temple grec pour donner une authenticité à la ville. Mais une ambiance cosmopolitaine rafraichissante imprègne les lieux. Tantôt nous traversons des zones très américanisée (comics shop, Starbuck etc.), tantôt nous nous retrouvons dans le quartier chinois que gardent deux divinités shintoïstes... Brisbane brasse une foule de personnes aux origines aussi variées que nombreuses, hantant le centre-ville dans leur errance quotidienne. De nombreuses zones de verdures, parcs et autres jardins botaniques dispatchés un peu partout, des marchés en tout genre, un grand nombre de terrasses de café (rares dans les villes pour ce qu’on en a vu) etc. donnent un caractère très reposant et agréable à la ville. Nous quittons la ville en soirée pour poursuivre notre chemin en direction de la Gold Coast (Côte d’Or) qui semble, aux dires de certains voyageurs que nous avons rencontrés, être l’un des sanctuaires du surf australien et du tourisme balnéaire en général.

 Champ de cannes à sucre entouré par les rails

 
Brisbane



Chinatown